Le mariage, une arnaque du patriarcat

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Hormis le mariage forcé, certaines personnes qui ont déjà intégré cette institution sociale expliquent que le mariage c’est pour célébrer l’amour aux yeux de tous, créer une alliance éternelle, fonder une famille et la cerise sur le gâteau, pour être plus heureux. Comme l’a souligné la Sainte Bible dans Proverbes 18: 22, “Celui qui trouve une femme trouve le bonheur; c’est une grâce qu’il obtient de l’Éternel”. Et autre part, la même Bible a tenu comme morale dans les Éphésiens, l’homme comme le chef et le sauveur de sa femme au sein de cette institution. Mais la question qu’il faut se poser: que gagne la femme mariée? Sur ce point, la Sainte Bible s’est gardée d’en parler.

Cependant, à cette question que la Bible n’a pas su apporter de réponse, certains croient que le mariage est une punition que la société inflige à l’homme pour contrecarrer son infidelité, mettant ainsi la femme en position de bénéficiaire. D’autres ont ajouté que c’est un manque d’amour et de confiance excessive qui pousse les partenaires à légaliser leur relation, limitant ainsi leurs actions, ce qui contraint majoritairement l’homme à abandonner toute activité extra conjugale pour répondre aux exigences de son épouse tant sur le plan affectif que financier. Cette privation de liberté place l’homme en position de victime dans le mariage et c’est une étape qu’il doit à tout prix éviter de franchir. De plus, le mariage est présenté comme un privilège, une faveur, un point trop important dans la vie d’une femme, le plus beau jour de sa vie. La femme qui se voit demander en mariage est hors catégorie, elle répond aux normes religieuses et sociales; c’est un honneur, alors elle en pleure et l’homme en a peur. Ce qui crée une politique qui encourage l’homme à fuir à tout prix cet engagement qui lui est apparemment désavantageux. La société construit par la même occasion ce sentiment erroné de “gagnante” dans l’esprit de la femme qui arrive à se faire mettre la bague aux doigts.

Dans cette société qui paraît majoritairement phallocentrique, le mariage est le seul instrument créé par le genre humain qui, soi-disant, est contre le bien-être des hommes car ce sont les femmes qui en profitent. Cependant, une étude démographique réalisée par le Conseil de l’Europe dans ses 43 Etats membres et rendue publique en 2022 à Strasbourg montre qu’un célibataire de 50 ans a trois fois plus de risques de mourir qu’un homme marié du même âge. Le Conseil constate une augmentation de 1,4% des risques de décès chez les hommes célibataires, pour une tranche d’âge comprise entre 20 et 65 ans, alors que leurs compatriotes mariés ont, au contraire, vu leur probabilité de décéder baissée de 2,3%. Tandis que pour les femmes mariées ou pas, toutes ont vu baisser leur probabilité de décès, de 1% seulement pour les célibataires et de 1,4% pour les femmes mariées. Des résultats qui poussent à se demander en quoi cette institution légale et/ou religieuse est-elle avantageuse à la femme exactement?

le mariage par définition

Étymologiquement, le ”mariage” a une racine latine qui vient du terme mas, maris qui signifie “mâle”. L’origine de l’union de deux êtres était masculine, c’est-à-dire la femme n’y prenait aucune part dans la décision. C’est son père qui décide de la marier à un homme, et ainsi la tutelle de la femme passait du père au mari. Selon le dictionnaire Larousse c’est un acte solennel par lequel un homme et une femme établissent entre eux une union dont les conditions, les effets et la dissolution sont régis par le Code civil (mariage civil) ou par les lois religieuses (mariage religieux). En outre, le mariage est historiquement un instrument de domination des femmes comme l’a souligné Marie Josèphe Bonnet, militante homosexuelle, historienne et feministe, lors d’une interview en 2014, publiée par “Libération”.

Ornée d’illusion et de pétale de rose, la femme se voit chanceuse. Ayant crû trouver la perle rare, elle se prépare à vivre son rêve car selon elle, elle le voulait, c’est son choix et elle a dit oui. La femme croit également qu’elle pourra grâce à l’amour, la plupart du temps, faire face à l’inégalité qui résidera dans son foyer. Mais, des études viennent contredire ces points de vue. Selon les derniers chiffres de l’Insee : “parmi les personnes ayant au moins un enfant mineur, les femmes passent en moyenne 1h34, quotidiennement, à s’occuper des enfants contre 43 minutes pour les hommes et elles consacrent 3h13 aux tâches ménagères contre 1h12″. D’où la question de la charge mentale qui fait débat ces derniers temps.

L’on entend par charge mentale ou charge mentale cognitive, un principe sociologique introduit dans les années 1980 qui décrit comment l’esprit d’une femme en couple qui travaille demeure préoccupé par les tâches ménagères et la gestion du foyer. Génératrice de stress et d’inégalités, la charge mentale conduit une femme à prendre en main toute l’organisation du foyer et à infantiliser son compagnon ( le chef de maison se transforme à ce moment en un  enfant supplémentaire ).

Dans une seconde étude réalisée par Sarah Flèche, Anthony Lepinteur et Nattavudh Powdthavee, les chercheurs découvrent que les femmes qui travaillent plus que leur conjoint sont moins heureuses. Elles sont moins satisfaites de leur vie familiale et conjugale et sont davantage stressées. Cette étude peut en quelque sorte aider à mieux saisir le sens de l’analyse économétrique, réalisée par Jeandidier et Bodson, qui révèle que la probabilité de divorcer est positivement corrélée avec le revenu d’activité de la femme, mais négativement avec celui de l’homme. Autrement dit, lorsque les femmes voient leur situation financière s’améliorer, le risque de rupture devient plus élevé. À l’inverse, ce risque tend plutôt à diminuer lorsque les revenus des hommes augmentent. Les chercheurs précités soulignent plus loin qu’au-delà de son impact sur les inégalités professionnelles, la charge mentale affecte aussi le bien-être des femmes.

Plusieurs pistes de solution ont été proposées pour adoucir l’effet du mariage sur la vie, la liberté des femmes. Bon nombre de revendications et de luttes se figent sur la question du choix des partenaires, de l’âge et du consentement pour certaines sociétés. Dans d’autres propositions, c’est le partage équitable des droits et des tâches menagères dans le foyer qui a été soulevé en vue de permettre l’émancipation de la femme mariée et du coup diminuner sa  charge mentale. Mais la question reste toujours d’actualité, peut-on réellement changer le mariage en s’attaquant uniquement à ses différentes formes sans y toucher le fond? Comme l’a si bien dit Marie josèphe Bonnet, citée plus haut, “parler de mariage pour tous c’est revenir en arrière”.

Trop de luttes ont été menées pour au final peaufiner l’œuvre du patriarcat. Même orné des plus belles roses, même avec la plus belle des cérémonies de mariage, même avec le meilleur époux, le mariage ne peut être avantageux pour les femmes. Il est peut-être temps d’avoir une critique radicale sur le mariage tant sur la forme que sur le fond car c’est une institution durement construite comme espace de domination.

Belizaire Eutaly

Ashley JEAN BAPTISTE
Je suis Ashley JEAN BAPTISTE, avocat du barreau de Mirebalais, licencié en Sciences de l'Education et copropriétaire de l'agence de presse en ligne Haïti Post